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    1] le climat en Moselle Alsace de 1335 à 1370


Le climat de 1335 à 1370 en Alsace-Moselle

Le temps au milieu du XIVe siècle

 

De 1335 à 1350 : une période de disette, assombrie par l’arrivée de la peste noire et par l'explosion de l’antisémitisme

En 1337 la situation de disette est terrible en Alsace ; la population souffre depuis longtemps de ce fléau et se retrouve souvent pieds et mains liés aux usuriers juifs dont ils sont obligés d’utiliser les services pour pouvoir continuer à (sur)vivre tout en s’enfonçant dans les dettes. Dans cette ambiance de haine attisée par quelques extrémistes, une bande de pillards s’organise en Basse-Alsace pour persécuter les juifs tant détestés et voler « ce qu’ils ont injustement gagné sur le dos des braves gens » pré tendent-ils ; ainsi 2000 voyous, partis de Dorlisheim (près de Molsheim) et  menés par un certain Armleder, dévalisent, rançonnent et parfois massacrent les juifs à travers la région et ce, malgré les protestations des autorités qui n’entreprennent pourtant aucune action contre ces actes de grand banditisme.

L’antisémitisme prend des proportions importantes puisque l’on compte environ 15000 juifs massacrés, notamment à Mulhouse, Ensisheim et Ribeauvillé.

Ces exactions se poursuivent jusqu’en 1938, les juifs de Rouffach subissent le même sort,  quant à  Armelder et ces sbires, ils vont aller jusqu’à mettre le siège devant Colmar pour qu’on leur livre les juifs de la ville, sans obtenir toutefois satisfaction.

L’antisémitisme prend tellement d’ampleur que l’autorité suprême, l’empereur Louis de Bavière, réagit de manière ferme contre les malfrats qui sévissent dans tout l’Empire ; en Alsace  il soutient  la formation d’une coalition de nobles et de bourgeois des villes pour s’opposer par les armes aux menées des pillards. Finalement  Armleder  est arrêté mais cela ne stoppe pas le moins du monde le phénomène.

L’hiver 1339 est très froid avec le gel total des cours d’eau, ce qui n’arrange rien ! C’est le moment que choisissent des meneurs pour organiser des manifestations antisémites  dans la ville de Strasbourg et la municipalité est obligé d’expulser les fauteurs de trouble.

En 1340, afin de détourner les édits impériaux  destinés à protéger les juifs, on commence à les accuser de fomenter un complot contre les chrétiens, on les accuse d’empoisonner les puits et d’être  responsables des épidémies qui frappent la population, d’autant plus facilement que la peste  reprend de plus belle ; c’est de nouveau le Kochersberg qui est le plus touché : la colère monte et on assassine des juifs injustement soupçonnés de répandre cette terrible maladie .

Les conditions climatiques finissent par s’améliorer en devenant plus clémentes, les esprits se calment un moment mais le ver est dans la pomme et l’antisémitisme persiste bel et bien ! Et ce phénomène n’est pas localisé à notre région, c’est le cas dans toute l’Europe !

En 1343 ce sont les crues du Rhin qui ravagent la plaine d’Alsace ; elles sont si puissantes qu’elles minent même une partie des remparts de Strasbourg dont de grandes portions s’effondrent dans les eaux boueuses.

Dès 1347 les juifs sont montrés du doigt à travers toute l’Europe comme étant les grands (et seuls) responsables de la peste noire, la plus meurtrière,  qui sévit d’abord dans le sud du continent. Alors que la Moselle et l’Alsace ne sont pas encore touchées, l’annonce de la propagation de cette maladie terrifie la population car le fléau provoque une forte mortalité. En 1348 on tremble de peur car la peste progresse très vite en remontant du sud ; des mouvements de panique ont même lieu, des sectes apparaissent et prédisent la fin du monde, les flagellants traversent la région en se frappant jusqu’au sang, offrant au menu peuple un spectacle de désolation. D’autres signes sont exploités par ceux qui profitent de la peur des gens pour arriver à leurs fins, comme les effets (surtout psychologiques) d’un petit tremblement de terre sans gravité qui secoue l’Alsace en janvier 1348.

En 1349 la peste noire finit par atteindre l’Alsace ; dès le 9 janvier les Bâlois s’acharnent contre les juifs qui sont brûlés sur des bûchers et la municipalité de Bâle demande à celle de Strasbourg de faire de même avant que les juifs n’arrivent à propager le fléau dans la ville. Strasbourg reste de marbre mais comme la peste continue sa progression…….les esprits s’échauffent !

Finalement, devant l’impossibilité de lutter contre la peste noire qui tue en 3 ou 4 jours après l’incubation, la population est frappée de plein fouet comme ces malheureux habitants de Villé qui sont décimés à 90% ; et les autorités vont s’acharner contre les juifs officiellement déclarés responsables de ce malheur !

A Mulhouse, comme dans d’autres villes, on exécute 900 juifs sur des bûchers à l’exemple de Bâle ; des centaines périssent de la même façon le 13 février 1349 à Colmar  alors que la ville de Strasbourg a commencé depuis le 9 février l’expulsion  de ses juifs, établis dans un quartier réservé ; la ville exige d’eux le baptême et les récalcitrants sont enfermés et finalement exécutés sur d’horribles bûchers le 14 février.

Seule la ville de Haguena, directement soumise à l’autorité de l’empereur, se refuse à participer à ce génocide parfaitement  injustifié (les juifs meurent également de la peste comme les autres) et épargne tous les juifs qui se sont réfugiés derrière ses remparts.

Mais rien n’y fait, la peste continue ses ravages et les massacres n’auront servi qu’à assouvir la rage de la population démunie car le fléau persiste.

L’été  1349 est très frais et pluvieux ce qui provoque de mauvaises récoltes et des vendanges médiocres, maintenant la pénurie alimentaire

Le nombre des décès est tel, à hauteur d’environ 30% de la population disparue dans cet épisode dramatique, que notre région va cruellement manquer de bras. Dès 1350, c’est le constat que font les autorités : l’agriculture déjà mal en point manque de bras, beaucoup de parcelles cultivées restent en friche et une forte hausse des prix s’amorce par à-coups jusqu’en 1360. Le bilan général de la peste noire qui est réalisé en 1353 estime ses ravages  à 25 millions de morts pour l’ensemble de l’Europe. La Moselle et l’Alsace ne sont donc pas des cas isolés !

De 1350 à 1370 : des années de séismes

Dans cette période on note un retrait lent mais visible des glaciers alpins qui débute vers 1350 pour durer environ 2 siècles puisque ce phénomène ne s’arrête que vers 1550 ; le climat se radoucit lentement mais d’une manière générale.

Le 15 octobre 1356, en Alsace,  a lieu un puissant tremblement de terre suivi de nombreuses répliques secondaires les jours suivants ; l’épicentre se trouve tout près de Bâle, ville en partie détruite, les morts s’y comptent par centaines. Le Haut-Rhin est également très touché, de nombreux édifices, églises, châteaux, sont endommagés, parfois totalement détruits, notamment dans le Jura Alsacien. Strasbourg, plus au nord, ne connaît pas de gros dégâts à l’instar des communes du Bas-Rhin. Des secours sont organisés en Alsace pour venir en aide aux sinistrés de la région bâloise.

En 1357 la pénurie alimentaire est toujours d’actualité, elle est principalement due au manque de main d’œuvre pour cultiver les champs et les prix ne cessent de monter. De nouvelles secousses sismiques ébranlent la région les 9 et 15 mai 1357 mais elles restent sans réelle gravité ; cependant, craignant le pire, la ville de Strasbourg  prend des mesures très fermes en ordonnant la destruction préventive des cheminées trop hautes et des pignons trop élevés et fragilisés.

En 1358 c’est l’hiver qui fait parler de lui car il fait vraiment froid et la neige est abondante ; il en est de même pour l’hiver 1361, très froid, avec des cours d’eau pris dans les glaces ; la peste bubonique est encore présente dans la région et la famine n’arrive pas à se résorber.

En 1362 la terreur hante de nouveau les Alsaciens avec un nouveau tremblement de terre, fort heureusement assez faible car il y a eu plus de peur que de mal ; cette année-ci de grandes tempêtes secouent nos forêts et nos masures, ce qui n’est pas non plus pour rassurer les gens.

Nouveau tremblement de terre en 1363, mais sans gravité ; c’est en décembre que l’hiver  commence avec des températures très basses qui se prolongent jusqu’en  janvier 1364 ; les rivières et le Rhin sont gelés pendant presque 14 semaines, le redoux n’intervenant vraiment que fin mars. L’année agricole 1364, on le devine, est très mauvaise et la famine s’aggrave dès 1365, surtout en Alsace, avec une invasion de campagnols, favorisée par un été très chaud, qui dévorent frénétiquement tout ce qu’ils trouvent jusque dans les greniers les mieux gardés. Enfin une nouvelle épidémie de peste bubonique se déclare en Alsace et frappe mortellement les plus affaiblis par les privations.

Mais, à partir de 1365 et davantage encore à partir de 1370, et jusque vers 1398, le climat sera marqué par des hivers en général doux et par des étés chauds, plus favorables à l’agriculture. Mais la misère a pris des proportions si terribles que les mendiants se comptent par milliers ; en 1367 la ville de Strasbourg organise des distributions de draps aux pauvres en plus de la nourriture déjà servie dans les rues. Enfin, la hausse des prix qui accroît la misère, assez irrégulière depuis  1350 mais avec de brusques variations, continue sa progression, de manière plus durable et régulière, et s’accélère encore de 1368 à 1370.

 


  par beck
 
    2] le temps en Moselle Alsace de 1370 à 1415


Le climat de 1370 à 1415 en Alsace-Moselle

La fin du XIV et le début du XVe siècle

 

De 1370 à 1387 : des années plutôt sèches et des hivers doux

Les années sèches restent même  dominantes jusque vers 1398 et, même si cela peut paraître contradictoire dans cette période, il y a tout de même eu des exceptions notamment  en 1374 : en effet, le 3 janvier de cette année, une inondation due à des pluies torrentielles et à la fonte rapide des neiges en altitude, provoque des dégâts importants dans la région de Murbach près de Guebwiller où l’on dénombre beaucoup de victimes humaines. 1374 est aussi marquée par une épidémie de choléra en Alsace et une épizootie qui touche le gibier en grande partie décimé dans nos forêts.

En 1376 c’est aussi le point culminant de l’épidémie de peste qui s’est (re)déclarée en 1370 : les morts se comptent par centaines. La misère reste également omniprésente dans la région, ce qui a une répercussion sur la sécurité des biens et des personnes ; l’insécurité s’aggrave car des bandes de miséreux s’organisent pour écumer la région en quête de gains faciles, de larcins, parfois de pillages et quelquefois même de crimes ; le morcellement du territoire ne permet pas  de faire un travail de police efficace.

L’agriculture manque toujours de bras plus de 20 ans après la peste noire qui a décimé la population et la situation alimentaire reste insuffisante ; en 1377, alors que la pénurie commence à se résorber, c’est le constat que l’on peut  toujours faire, même si l’on note le début d’une baisse des prix qui s’amorce de manière constante ; de meilleurs récoltes font baisser de 54% le cours du seigle, la céréale prédominante,  pour atteindre cette année-ci un niveau même inférieur à celui de 1349. Mais ceci ne compte pas pour le vin car en 1377 les vendanges sont un vrai désastre.

En 1378 la production agricole est favorisée par un temps doux mais avec un grand bémol : d’une part, la main d’œuvre reste peu nombreuse (et cela va durer tout de même jusque vers 1500) et d’autre part, les campagnols pullulent de nouveau, à cause du temps beau et chaud, et font des ravages en s’attaquant aux récoltes et aux stocks.

Il faut attendre 1380 pour avoir une véritable bonne année, tant pour l’agriculture que pour le vignoble favorisés par un été chaud en Moselle –Alsace ; une crise monétaire se déclare dans le sillon rhénan et va un peu tempérer l’enthousiasme naissant. De plus,  une énième épidémie de peste joue les trouble-fête : Strasbourg est touchée de plein fouet et compte de nombreuses victimes, de même dans le Kochersberg ; cette épidémie va s’éterniser jusqu’en 1384.

En 1381 la peste se propage très vite sur toute la région et cela continue en 1382 avec un été beau et chaud qui favorise le développement des germes. Le point culminant du fléau est atteint en 1384 puis l’épidémie décroît très vite.

En 1386, le printemps est spécialement doux et pluvieux après un hiver sans grands coups de froid mais, fort heureusement, l’été rattrape le tout et les récoltes sont bonnes, surtout en Alsace. Mais voilà que la grippe se met de la partie et frappe durement la région en 1387.

De 1388 à 1398 : des années sèches avec de très bonnes vendanges successives

Ces 10 années bénéficient d’un temps en général agréable, doux en hiver, chaud et sec en été ; la situation alimentaire s’améliore rapidement et considérablement ; les viticulteurs se frottent les mains car le vin est bon et en quantité, sans toutefois connaître la surproduction qu’a déjà connue le siècle.

En 1393 par exemple, l’année est notée comme étant très chaude et les vendanges sont précoces ; mais c’est aussi sans compter avec les coups de colère du Rhin qui, au cours d’une crue subite après des orages violents, inonde une partie de la plaine et engloutit à jamais le petit village de Thierhurst, appelé parfois Thierheim.

Les résultats de ces belles années de bonnes récoltes ne se font pas attendre : le prix du blé baisse beaucoup, celui du pain est à 50% du prix le plus bas enregistré les dernières 40 années, c’est dire ! Cela s’inscrit aussi  dans un contexte de baisse générale des prix courants qui, parallèlement, correspond aussi à une baisse des salaires versés aux ouvriers.

Le 15 février 1397 a lieu une terrible tempête qui détruit le clocheton du chœur de la cathédrale de Strasbourg ; le vent violent attise aussi un incendie qui s’est déclaré dans la ville et près de 400 maison, construites pratiquement toutes en bois et torchis, partent en fumée, laissant de nombreux sans-abris. C’est une catastrophe dont Strasbourg mettra du temps à se remettre.

Enfin pour clore cette période, en 1398, une crue du Rhin ravage de nouveau la plaine d’Alsace en emportant le village de Rhinau ; le chapitre  de chanoines qui y est établi depuis des siècles, miné par des années de réparations sans cesse à refaire, décide dès lors d’abandonner purement et simplement  le site pour s’installer définitivement à Strasbourg.

De 1399 à 1405 : des années humides, très pluvieuses

En 1399 une crue de la Moselle inonde la ville de Metz le 5 avril occasionnant des dégâts importants ; l’Alsace souffre un peu moins de l’humidité et l’on constate même que l’année agricole est plutôt bonne dans l’ensemble.

L’hiver 1400, par contre,  est très froid avec des cours d’eau gelés, ceci est, fort heureusement rattrapé par un été chaud ; c’est justement à la belle saison qu’un orage violent s’abat sur Strasbourg et la foudre frappe la cathédrale, détruisant également la grande grue qui sert à la construction de la flèche ; l’incident est spectaculaire mais il y a plus de peur que mal ! La foudre touche également l’église St Thomas : elle travers e la toiture de l’édifice mais le feu est heureusement maîtrisé grâce aux pluies diluviennes qui tombent sur la ville.

En faisant  le point  sur l’état du vignoble alsacien en 1400, l’on constate que la vigne s’est beaucoup étendue, ceci jusque dans la plaine d’Alsace, les dernières 50 années ; chaque couvent, chaque seigneur, beaucoup de bourgeois, possèdent des vignes. C’est que le vin d’Alsace a une très bonne réputation, il s’exporte facilement jusqu’en Angleterre mais aussi en Russie et en Scandinavie. La situation agricole étant favorable, des bourgeois des villes investissent dans les rentes  agricoles qui leur rapportent  de gros bénéfices et cette pratique prend de l’ampleur.

En 1402 c’est de nouveau la foudre qui endommage la cathédrale de Strasbourg le 13 août ; les fortes pluies qui accompagnent  l’orage arrivent heureusement à limiter les dégâts causés par l’incendie.

Enfin l’année 1403 est notée comme pluvieuse, de même en 1404 où un crue du Rhin  provoque la désintégration du pont de bateaux qui relie Strasbourg à la rive droite du fleuve ; la ville est obligée d’entreprendre sa reconstruction immédiate car, de ce pont, dépend aussi sa prospérité économique.

De 1405 à 1415 : retour des hivers froids

L’hiver 1405 est très froid, les rivières gèlent mais le reste de l’année est plutôt dans les normes et les récoltes sont correctes. En 1406 c’est une nouvelle crue du Rhin qui emporte définitivement le château de Rhinau, qui avait résisté à l’assaut des flots jusqu’ici, et qui endommage le village de Rhinau à peine relevé de ses ruines.

Dès le 11 novembre 1406 l’hiver entre par la grande porte dans la région avec de fortes gelées ; en effet en 1407, l’hiver est si intense que les arbres fruitiers en souffrent cruellement ; de plus cet hiver est suivi de grandes inondations. Dès le 10 novembre, l’hiver repend de plus belle et les fortes gelées persistent jusqu’au 31 janvier 1408 ; après une accalmie de 2 semaines, le froid fait un retour brutal du 15 février jusqu’au 10 avril ; bien évidemment les arbres fruitiers paient un lourd tribut tout comme la vigne très endommagée par le gel prolongé. Fin 1408, le 11 novembre, un froid glacial fige rapidement les eaux du Rhin qu’on peut traverser avec des chariots chargés.

Dès 1410 les hivers redeviennent plus cléments et, pour terminer cette période, il faut encore citer l’orage mémorable du 13 juillet 1414 : en effet la foudre frappe la Tour du Trésor (Pfennigturm) de la ville de Strasbourg et allume un incendie à un pâté de maison juste au moment où l’on organisait de grandes festivités en l’honneur de l’empereur Sigismond, en visite officielle dans la ville ; ce fut du plus mauvais effet pour le monarque qui s’aventura en chausses dans les rues boueuses de la ville et l’affaire fit grand bruit à travers tout l’Empire, ternissant un peu la réputation de la ville.


  par beck