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    1] mieux comprendre ces phénomènes


Le mois de mars nous a gâté avec ses giboulées, ses chutes de neige mouillée mais aussi avec le grésil et même de la grêle sous les averses les plus fortes. C'est que la nature peut parfois se montrer rude quand les masses d'air  s'entrechoquent comme ce fut le cas lors de la fin du mois. L'alsace et la Moselle connaissent périodiquement des orages de grêle ou de grêlons, qui, comme le relatent d'anciennes chroniques ou des articles de presse, ont pu occasionner d'importants dégâts dans les forêts, les cultures et même les bâtiments.

 

Pour ce qui est de la grêle, ça commence toujours par des courants d'air chaud s'élevant en altitude et pénétrant dans de l'air froid, ce qui forme des cumulonimbus ou « cb » au sein desquels les courants ascendants peuvent devenir vigoureux. Le sommet de ces « cb » peut atteindre des altitudes très élevées, de plus de 10.000 m avec des températures glaciales inférieures par moment à -50°C. A ces hautes altitudes la vapeur d'eau va geler rapidement en formant des cristaux de glaces qui, eux-mêmes, vont agglutiner de la vapeur d'eau qui va se congeler autour de leur noyau, formant au départ de petites billes de glace.

 

Comme les turbulences dans les « cb » sont assez capricieuses, ces petites glaçons vont se trouver projetés dans plusieurs couches humides et ils vont grossir peu à peu jusqu'à trouver le point de rupture lorsque leur poids devient plus important et /ou quand le courant ascendant faiblit. Alors, c'est la chute vertigineuse vers le bas et, avec la poursuite du phénomène de congélation, l'humidité continue à se condenser autour des glaçons.

 

Nous , les anciens, nous nous souvenons très bien de la terrible grêle du 11 août 1958 où les grêlons ont pris des tailles démesurées, frôlant les 980 g pour certains specimens; ce fut vraiment impressionnant, je l'ai vu, de mes yeux vu, j'entends encore ces véritables blocs de glace se fracasser sur les toits, la végétation, les voitures...... une catastrophe ! A regarder de près ces grêlons, ils étaient formés de plusieurs couches de glace, les unes sur les autres, un peu comme c'est le cas pour les peaux superposées des oignons.

 

La plus grosse chute de grêlons au monde tomba le 14 avril 1986 au Bengladesh; de véritables obus d'1 kg fondirent sur une population mal protégée, tuant au passage 92 personnes. La chute la plus dévastatrice et la plus intense se produisit le 30 avril 1888 en Inde avec des grêlons de la taille d'une balle de cricket qui tuèrent 246 personnes, certains par impact direct mais la plupart par hypothermie car elles furent blessées et en partie recouvertes par la glace qui, par endroit, forma des congères d'un mètre de haut. 1600 têtes de bétail périrent également lors de cet évènement.

 

Les chutes de grêle ou de grêlons peuvent également provoquer des catastrophes aériennes comme ce fut le cas pour un DC9 qui a perdu  tout contrôle le 4 avril 1977 en Géorgie aux USA. Le pilote avertit la tour de contrôle de New Hope qu'un réacteur fut mis hors d'usage, que le cockpit éclata  et , peu après, que le deuxième réacteur prit feu...... en essayant de se poser sous l'averse sur une route de campagne, l'avion heurta des arbres et des poteaux électriques pour s'encastrer dans un magasin et prendre feu: résultat, 68 morts !

 

Le 14 juillet 1953, dans la province de l'Alberta au Canada, une chute de grêle laissa au sol un sillon de 225 km de long et 8 km de large; les grêlons de la taille de balles de golf saccagèrent tout sur leur passage, les plantes furent déchiquetées et enfoncées profondément dans le sol, les arbres ne portaient plus une seule feuille; une association de protection de la nature recensa 36000 oiseaux happés par le cataclisme. Quelques jours plus tard ce phénomène  se reproduisit tuant de nouveau 27000 autres volatiles.

 

Aux USA, pays des tornades, les chutes de grêle ou de grêlons occasionnent chaque année des dommages évalués, bon an, mal an, à 300 millions de dollars. A Johannesbourg en Afrique du Sud, en janvier 1980,  eut lieu une tempête de grêle au-dessus de l'aéroport Jan Smuts où les dégâts faits aux infrastructures et aux avions ont été évalués à 10 millions de dollars. Ce même aéroport fut de nouveau touché en novembre 1983 avec 15 millions de dollars de dommages, puis encore une fois en novembre 1984 pour 30 millions....... et l'histoire ne s'arrêtera certainement pas là.

 

Mais le record est tenu par les Amériques  en l'an de grâce1981 où l'effet dévastateur de deux orages de grêle ont pris des proportions gigantesques: 200 millions de  dollars de dommages en mai au-dessus du Texas et de l'Oklahoma et 100 millions de dollars au-dessus de l'Alberta au Canada.

 

Ces phénomènes peuvent aussi toucher l'Europe comme ce fut le cas  le 12 juillet 1984 au-dessus de Munich qui subit une tempête de grêlons qui ravagea plantes, toits et automobiles : l'évaluation des dégâts donna une dette de 700 millions de marks, mais en tenant compte des effets collatéraux et des biens non ou mal assurés la facture finale pour la Bavière a atteint la somme astronomique de 1,5 milliards de marks.

 

Pourtant rien ne laissait prévoir une telle violence; au contraire, les jours précédents étaient beaux, ensoleillés avec un ciel tout bleu; l'après-midi du 12 juillet on atteint la température de +30° avec la naissance d'un courant ascendant puissant formant rapidement de gros « cb ». Vers 20h la grêle se mit à tomber  avec des billes de glace d'un diamètre moyen de 5 à 6 cm, les plus gros atteignant 9,5 cm et le poids de 300 g, tombant à la vitesse vertigineuse de 150 km/h. C'est l'Est de la capitale bavaroise qui fut le plus touché avec les bourrasques les plus violentes et des pluies torrentielles qui prirent le relai. Le vent y soufflait si fort que les grêlons semblaient presque tomber horizontalement, fracassant au passage vitres et vitrines. Cette tempête dura entre 20 et 30 minutes et il y eut une couche de 20 cm de glace dans les rues de la ville. Après s'être éloigné de Munich, le gigantesque orage poursuivit sa route jusqu'à 22h en perdant progressivement de sa puissance mais laissant un sillon de désolation de 300 km de long pour une surface de 1500 km2. Beaucoup d'arbres qui perdirent tout feuillage furent également déracinés. Il va sans dire que les nombreuses serres qui entourent Munich ont été totalement détruites, le verre brisé fut tellement enfoncé dans le sol qu'il fallut, par la suite,  décaisser la terre impropre à la culture pour la remplacer par de l'humus frais. 70.000 bâtiments ont perdu leur toiture sans compter les fenêtres, marquises, façades, vitrines, antennes et autres objets « passés à la moulinette ». De plus les pluies torrentielles produisirent des inondations dans la ville, on ne savait plus où donner de la tête ! 250.000 voitures furent endommagées, les 24 avions présents à l'aéroport, dont un nouveau Boeing 757,  subirent les mêmes dommages mais ce furent les 150 petits avions de tourisme des 4 aérodromes voisins qui furent le plus touchés. Pour les dégâts humains on recensa 400 blessés, principalement touchés à la tête, aux épaules et aux bras, mais, fort heureusement, il n'y eut  pas de mort , un miracle !

 

Que faire devant ces véritables bombes naturelles dont on ne sait pas vraiment se protéger. Il y a bien les fusées anti-grêle que l'on tire dans les « cb » pour provoquer les précipitations dans des zones peu habitées mais cette solution a ses limites :  en 1902  il y eut des expériences de ce genre en Autriche et l'on déplora 11  morts civils suite à ces tirs. Dès 1905, en Italie, fut organisée une Conférence Internationale sur la Grêle avec 65 délégués de 6 pays, pour trouver des parades à ces super »cb » ! Mais que peut-on vraiment contre le déchaînement des éléments sauf à les prévoir le plus tôt possible et à prendre les mesures appropiées pour la protection de la population.

 

Alors, attention, le mois des plus fortes chutes de grêles dans le monde, c'est le mois d'avril ! S'il ne faut pas « quitter un fil » avant le mois de mai comme l'annonce le dicton, ne vous promenez tout de même pas avec un casque.......SAUF SI VOUS FAITES DE LA MOTO  !

 Jean Beck

  par beck